Témoignage : Jessica Lavigne (Provence-Alpes-Côte-d’Azur)

Je suis IDEL, j’exerce en PACA, dans les Bouches du Rhône, plus précisément dans le 15ème arrondissement de Marseille (quartiers nord de la ville). Un désert médical urbain et une population précaire. Je suis IPA diplômée, mais je n’exerce pas encore ces nouvelles fonctions, car elles ne sont pas suffisamment rémunérées pour que cela soit financièrement viable.

Concernant mes fonctions à Convergence Infirmière, je suis administratrice nationale, référente pour la section IPA, titulaire en CPD et commission des pénalités dans le 13, mais aussi référente départementale du 13, suppléante en CPR des CPTS en PACA.

J’occupe également d’autres postes, notamment celui de présidente et coordonnatrice CPTS Actes-Santé (14e/15e/16e à Marseille… en théorie deux jours par semaine, mais en pratique, je ne compte pas mes heures !) et administratrice Géronto Nord (pôle infos seniors de mon secteur).

Enfin, j’occupe le poste d’ailier dans l’équipe loisirs de Handball de ma commune d’habitation… et je suis surtout maman d’une petite fille de 4 ans et demi très active !!!

► Quelles actions ont été mises en place pour assurer le dépistage et le suivi des patients Covid ?

Pour ce qui concerne les patients : au sein de la CPTS, comparativement au premier confinement, et devant la multiplication des cas Covid +, les tournées dédiées n’ont désormais plus lieu d’être, car il y a des patients Covid dans de nombreuses tournées IDEL. C’est pourquoi nous organisons la prise en charge des patients Covid + sur demande, quand le cabinet initial n’arrive pas à s’organiser. Nous équipons les IDEL sur demande en EPI pour les PEC de ces patients et répondons à toutes les questions qui nous sont adressées, puisque nous essayons de suivre les changements législatifs quasi-quotidiens. Enfin, nous travaillons également en interCPTS.

Concernant le dépistage, nous disposons de nombreux lieux de dépistage opérationnels sur le territoire de la CPTS et de délais de résultats très corrects. Nous venons donc en renfort ; très régulièrement à la demande des EHPAD, de collèges ou d’autres institutions, en partenariat avec les laboratoires adhérents pour des campagnes de dépistage massif. Nous faisons alors appel au volontariat de nos adhérents, pour réaliser ces dépistages. Il faut enfin noter que la proximité géographique de l’IHU biaise la vision globale que nous pouvons avoir de la situation, car les patients ont tendance à se rendre directement à l’IHU, sans passer par leurs professionnels de terrain habituels.

Pour ce qui est des Trod (test rapide d’orientation diagnostique), nous disposons d’un fil WhatsApp sur lequel nos pharmaciens adhérents nous informent de la livraison de tests antigéniques, ce qui nous permet d’orienter les professionnels qui sont à leur recherche le plus rapidement possible.

► As-tu utilisé une application de traçabilité ?

Non, simplement mon logiciel professionnel habituel. Nous n’avons pas accès à l’outil ″e-Parcours″ régional pour le moment ; il devrait être accessible début 2021.

► L’organisation de tes tournées a-t-elle dû être modifiée ?

Oui. Ainsi, quand il y a un patient Covid à prendre en charge, il est systématiquement positionné en fin de tournée, afin de diminuer au maximum le risque de contamination transverse vers les autres patients, fragiles et sains.

► Ton travail quotidien est-il devenu plus compliqué ?

Oui, comme pour mes collègues. Et notamment d’un point de vue matériel. J’ai même remis ma blouse, alors que je travaillais en civil depuis des années… et j’ai une consommation dramatique de gel hydro-alcoolique !

Auprès des patients, il faut continuer à rassurer, rappeler sans cesse les consignes et les gestes barrières, car dans la durée, les patients baissent leur garde et prennent des risques inconsidérés. Notamment parce qu’ils n’ont pas vu leur famille depuis trop longtemps. Cela commence à être difficile à gérer pour de nombreuses personnes âgées et même pour les plus jeunes. Nous avons de nombreux décès sur la région et les lits de réanimations sont souvent annoncés comme saturés, ce qui contribue massivement à augmenter le climat d’angoisse déjà existant.

► Comment es-tu organisé : en interpro ou en monopro ?

Nous sommes organisés en interpro, en CPTS. Les obligations liées à la CPTS perdurent et les objectifs à atteindre, en termes de finalisation du projet de santé, restent inchangés, malgré les complications générées par la crise. Nous travaillons également en interCPTS, en essayant de mutualiser les infos et le travail d’organisation.

► Comment se passe ton approvisionnement en EPI ?

Le ravitaillement en EPI est prioritairement assuré pour les adhérents, puis aux autres professionnels, sur demande. Les EPI sont mis à disposition dans l’une de nos pharmacies aux amplitudes horaires d’ouverture importantes, pour que les professionnels puissent les récupérer facilement.

► As-tu mis en place un système de “drive” ?

Non. Des laboratoires ont mis en place des ″drive″ sur site et d’autres sur les parkings de grands magasins. Nous n’avons donc pas investi ce champ, car les besoins en tests sont déjà pourvus.

► L’ARS et les URPS ont-elles été utiles, durant cette crise sanitaire ?

Oui : l’ARS nous a alloué des financements complémentaires, pour poursuivre le développement de la CPTS, malgré la crise.

Les URPS sont également des partenaires précieux. Notamment l’URPS IDEL (dont la Présidente est adhérente à Convergence Infirmière), qui a négocié des tarifs d’achat d’EPI, proposé des procédures de PEC des patients Covid +, collaboré en inter URPS… Il y en a d’autres qui ont œuvré utilement, telles les URPS biologistes… mais moins pour ce qui concerne les ML…

► Un dernier mot ? Une suggestion ?

L’une des difficultés majeures est la prise en charge des patients Covid + qui, souvent, sont asymptomatiques et ont juste une prescription de Lovenox une à deux fois par jour, sans prescription de surveillance Covid +. En effet, les IDELs dépensent plus en EPI pour aller réaliser ce soin que ce qu’elles y gagnent (7 euros brut par passage)…

Enfin, comparativement au printemps dernier, on constate que les appels au volontariat sont moins suivis d’effet : les IDELs commencent à être fatigués, certains n’ont pas eu de congés depuis très longtemps, d’autres sont partis en renfort à l’hôpital ou en EHPAD… et il faut aussi garder en tête que les campagnes de vaccination Grippe et Covid devront être assurées…

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