Jeudi 8 décembre, à 21h10, sera diffusée sur France 2 l’émission Cash Investigation présentée par Elise Lucet. Dans un communiqué de présentation de cette émission, il est indiqué que « les infirmiers libéraux sont les professionnels de santé qui fraudent le plus ». La sentence est tombée, nous sommes une profession d’escrocs et d’arnaqueurs qui « gonflent artificiellement les factures des assurés et notamment des patients les plus âgés et vulnérables ».

Ces arguments traduisent une méconnaissance totale de notre profession et de nos problématiques. Les fraudeurs y existent, comme partout, mais ils sont une infime minorité et nous condamnons évidemment ces pratiques. Il faut préciser que sur l’enveloppe de 9 milliards consacrée aux soins infirmiers en ville, la fraude représente 0,4%. De plus, nous sommes de loin les professionnels de santé les plus nombreux avec 127 000 IDEL ce qui rend mathématiquement les chiffres plus importants pour notre profession.

La réalité, c’est que notre nomenclature, qui contient plus de 100 actes, est une source inépuisable d’erreurs. D’ailleurs les CPAM elles-mêmes en perdent leur latin et ont des interprétations divergentes sur certains sujets. Notre NGAP faite par des énarques et pour des énarques est une cause très importante d’indus. A quand une simplification pour éviter les pièges institutionnalisés ?

Les libellés des ordonnances médicales ne correspondent que rarement à la réalité de la NGAP et les médecins n’ont évidemment pas de temps à consacrer à l’écriture d’une longue ordonnance.

De plus, la façon de procéder aux contrôles est piégeuse. Nous savons pertinemment, pour avoir de nombreux exemples, que certaines CPAM laissent perdurer des erreurs pendant des mois, voire des années, avant de « taper » sur les infirmières et les infirmiers libéraux concernés. A quand des services de la Sécurité sociale qui soient là pour accompagner les professionnels de santé et non pas uniquement pour sanctionner et même piéger ? Convergence Infirmière réclame à cor et à cri depuis des années une réforme de la gestion du risque, afin que les procédures de contrôle qui sont sources de stress ne s’éternisent pas durant des années et que l’on ne remonte pas aux calendes grecques pour effectuer les contrôles d’activité.

Malheureusement, l’article 44 du PLFSS 2023 ne démontre pas la volonté d’un état d’esprit plus constructif, bien au contraire. La défiance et le mépris des pouvoirs publics sont à leur comble puisque désormais les indus pourront être extrapolés à partir d’une fraction de l’activité du professionnel de santé.

Que cherche-t-on avec de telles mesures ?

Que cherche-t-on avec de telles émissions de télévision ?

La mise à l’index d’une profession toute entière ? Sa fin programmée ? Encore plus de démissions ? Des patients sans aucun soignant ? Des morts ?

Si Elise Lucet veut un véritable débat contradictoire dans la prochaine émission Cash Investigation, nous nous tenons à sa disposition pour intervenir et porter la réalité du terrain.