INTERVIEW : “On n’en peut plus !”

Mi-septembre, le gouvernement a levé le voile sur les différents “cadeaux fiscaux” qui émailleront le budget 2017. Différentes catégories rejoignent ainsi la liste des ″gagnants″ : les retraités, les classes moyennes et les entreprises. Pour Véronique*, infirmière libérale de 48 ans exerçant en Auvergne-Rhône-Alpes, ″c’est insupportable et totalement incompréhensible !

Une pilule amère… en attendant la cigüe ?

La politique fiscale menée par l’État Français me laisse dubitative… D’après les chiffres que l’on nous ressasse à longueur de journée, de moins en moins de citoyens paient l’impôt sur le revenu. Pour autant, et c’est là que cela devient abracadabrant, les charges de l’État – qui ne cessent de s’alourdir, elles – doivent bien être assumées par quelqu’un. Ou plutôt par quelques-uns. Et par le plus grand des hasards, on s’aperçoit que ce sont toujours par les mêmes ! Tous ces gens sont comme moi : pas forcément riches, mais pourtant, ce sont bien eux qui paient de plus en plus !″ Pour notre infirmière libérale, les réductions d’impôts annoncés par le Gouvernement s’apparentent à une ″pilule amère″ restée coincée en travers de sa gorge…

En dépit des apparences, ″libéral″ ne rime pas avec ″fiscal″

Installée à son compte depuis près de 25 ans, Véronique est littéralement dégoutée. ″J’ai évidemment entendu parler d’une baisse d’impôt de 33,3 % à 28% pour les sociétés, mais en tant qu’infirmière libérale, je vais forcément passer à côté, puisque le régime fiscal de l’impôt sur les sociétés omet de prendre en compte les professions libérales. Et pourtant, ceux qui écrivent et édictent les lois qui régissent nos vies savent-ils seulement que je fonctionne comme une entreprise, avec des charges ? Savent-ils que je travaille 50 à 70 heures par semaine, dimanches et jours fériés compris ? De jour comme de nuit ? Et ce quelle que soit les conditions météorologiques, puisque nous nous devons de soigner nos patients. Et je ne peux même pas m’arrêter pour cause de maladie, puisqu’il me faudrait alors attendre 30 jours de carence pour commencer à toucher des indemnités… Pour cela aussi, nous ne sommes pas tous soumis au même régime. Loin de là, même !

Payer plus… donc travailler plus !

Et puis, je vous l’avoue : je ne me considère absolument pas comme étant riche. Je vis sans faire d’excès, sans faire d’optimisation fiscale. Je ne peux d’ailleurs même pas épargner ! Sans parler du fait que je sois célibataire… Bien entendu, est-ce utile de vous préciser que je n’ai droit à aucune aide. Par contre l’État n’a de cesse de me fixer un devoir, immuable : payer plus… donc travailler plus… pour ensuite payer encore plus, etc, etc, etc…″ Une sorte de cercle vicieux qui donne à Véronique l’impression que l’on s’acharne sur sa profession. ″Parfois, j’ai le sentiment qu’on nous prend pour des mules que l’on charge. Encore et encore. On en vient même, avec des collègues, à se demander si personne n’attend que l’on s’écroule.

″Pour qu’il y ait le moins de mécontents possible, il faut toujours taper sur les mêmes″ (proverbe Shadoks)

Cette situation est inacceptable, injuste et franchement indigne. J’aurais bien aimé, moi aussi, avoir une part de ce gâteau fiscal. Un petit geste de reconnaissance, en somme, pour tous les efforts fournis, car depuis 2012, mes impôts n’ont jamais cesser d’augmenter ! C’est sur les charges que nous demandons à l’État d’intervenir. C’est en les réduisant que le Gouvernement pourra nous soutenir et nous soulager.″ Taquine, Véronique ne peut s’empêcher de sourire. En pleine interview, lui revient le souvenir d’une série animée complètement loufoque diffusée dans les années 60/70 : ″Les Shadoks″. ″C’était vraiment absurde, à l’image de la politique sociale et fiscale que l’on nous impose. Me revient d’ailleurs en tête l’un des plus célèbres proverbes de ces drôles d’oiseaux : « Pour qu’il y ait le moins de mécontents possible, il faut toujours taper sur les mêmes ». Et c’est très exactement ce qui est en train de se passer : on a toujours droit à la double peine. C’est dire combien nous sommes considérées par nos têtes pensantes…

* Pour des raisons personnelles et professionnelles évidentes, Véronique a préféré témoigner dans l’anonymat. Un choix que ″Convergence Infirmière″ respecte, bien entendu.

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